Bonne fête petite maman! - Montage Vidéo Kizoa
Témoignage: je suis une mère S.O.S
Ma vie, je l'ai toujours imaginée à l'étranger, au milieu d'enfants. Après une licence d'ethnologie, je suis devenue éducatrice de jeunes enfants. J'ai longtemps travaillé en crèche et puis un jour, je me suis retrouvée au chômage. Que faire ? A 40 ans, j'étais seule et sans enfant. Je cherchais un peu un but à ma vie. Une amie m'a parlé des villages SOS, elle avait vu une émission à la télé. Je m'y suis tout de suite vue ! M'occuper d'enfants séparés de leurs parents en raison d'une situation familiale difficile, les accompagner sur plusieurs années, c'était fait pour moi. Je me suis quand même posé la question : prendre en charge une fratrie, n'était-ce pas, plus ou moins consciemment, chercher à combler un désir d'enfants ? Auquel cas, je n'aurais pas été dans le juste. Au final, je ne crois pas. Certes, il y a un deuil à faire. Mais je peux me dire que ce n'est pas pour rien si je n'ai pas eu d'enfants. De toute façon, je ne me suis jamais projetée dans une vie de famille classique avec un mari et des enfants.
D'emblée, on m'a confié trois petits garçons de 4 ans, 6 ans et 7 ans. J'étais pleine d'ardeur et heureusement, car les débuts n'ont pas été faciles ! Ces enfants ont une histoire familiale chaotique. Ils ont été victimes de violences et leur mode de communication en est resté très marqué. Ils disent beaucoup d'insultes, donnent des coups. Une fois, ils m'ont même menacée avec un couteau ! Ce sont des colères d'enfants en grande souffrance, ce n'est pas dirigé contre moi personnellement. Mais dans les premiers temps, ça me renvoyait à ma propre violence et je pouvais devenir virulente. Jusqu'au jour où j'ai lu la peur dans leurs yeux. Ça m'a calmée. Aujourd'hui, je reste paisible quoi qu'il arrive. Si je suis tapée, je me protège, je ne frappe jamais. Et en cas de problème, je fais appel au directeur du village ou à l'équipe d'éducateurs. A un moment, quand les garçons étaient très durs, ils venaient presque tous les jours à la maison. Maintenant je gère mieux. J'essaie de border avant que ça ne clashe.
"Je ne prends pas la place de leur maman"
Autant ces enfants sont difficiles, autant ils peuvent être affectueux. Ils viennent se lover contre moi dans le canapé, ils me font des dessins. Le plus petit m'appelle « maman » mais ses frères le reprennent : « C'est pas ta mère ! » L'aîné, lui, m'appelle « Mama ». Ça a l'avantage de pouvoir passer pour un diminutif de Marie. J'explique que je ne prends pas la place de leur maman, que je suis là pour m'occuper d'eux le temps nécessaire. Leur mère vient les voir une fois par mois au village et, dernièrement, ils sont allés passer une journée chez elle. Ils rêvent de retourner vivre avec elle mais ils savent que ça va être compliqué parce qu'elle a d'autres enfants. Il leur arrive de m'en vouloir de cette situation. J'essaie de leur expliquer que je n'y suis pour rien.
Notre vie est organisée comme celle de n'importe quelle famille. Je les accompagne à l'école le matin. A midi, j'en prends un à la maison pour passer un moment en tête à tête avec chacun. Une fois par semaine, ils vont tous les trois à la cantine. Ça me permet de me poser un peu. Après 16 h 30, c'est la sortie d'école, le goûter, les devoirs, le bain, la préparation du dîner. Et puis le rituel du soir. Un moment très important parce que quand la nuit vient, c'est le réveil des angoisses. Ils me demandent de leur parler de ma famille. Ils veulent savoir pourquoi je n'ai pas d'enfants. Ils me disent : « C'est triste » mais je réponds que non, sinon je ne serais pas ici avec eux. Un jour, l'un d'entre d'eux m'a demandé : « Et si ma maman mourait, tu voudrais m'adopter ? » Leur grande angoisse, c'est de savoir si je suis fiable. Un an après, ils ne me font toujours pas confiance. Il faut que je sois toujours très rigoureuse, que je fasse absolument ce que j'ai dit que je ferai.
"Je ne suis pas le sauveur"
J'essaie de leur donner confiance dans les adultes, de les aider à construire leurestime d'eux-mêmes. Ils ont beaucoup de mal à entendre les bonnes choses qu'on leur dit sur eux. Ils se voient comme mauvais. Inconsciemment, ils pensent que si leur maman n'est pas là, c'est de leur faute. Alors je valorise les moments que nous passons ensemble plutôt qu'eux-mêmes. Je dis « On a passé une super journée. » J'essaie aussi de les féliciter lorsqu'ils parviennent à surmonter leur colère. De là à les réparer… Je ne suis pas le sauveur. Moi j'essaie d'assurer au mieux le quotidien, de leur donner beaucoup d'affection, de leur transmettre les valeurs qui me semblent importantes, de les aider à établir de bonnes relations entre eux. Quand je suis avec eux, je ne pense pas en permanence à leur histoire, ce serait trop déprimant. Je les élève normalement, je ne les plains pas.
24 heures sur 24, c'est parfois très dur ! Ce serait plus facile s'il y avait un homme à la maison, bien sûr [certaines mères sont en couples, ndlr]. Il pourrait prendre le relais quand je n'en peux plus. Heureusement, l'équipe est très présente et je me suis toujours sentie soutenue. Et puis je ne travaille « que » trois semaines sur quatre. La quatrième est pour moi, ça me permet de souffler. Une aide familiale vient me remplacer à la maison pendant que je pars rejoindre ma propre famille, du côté de Bordeaux. Le premier jour, je pense beaucoup aux enfants mais ensuite, c'est du temps pour moi. J'essaie de ne pas les appeler au téléphone, je ne communique qu'avec l'aide familiale. C'est compliqué pour elle de trouver sa place si je suis omniprésente.
Δεν υπάρχουν σχόλια:
Δημοσίευση σχολίου